SECRETS DE JARDINS

IL FAUT SAUVER LE VRAI JARDINIER

JUIN 2025

Jardiner c'était mieux avant...?

1/

Les jardiniers139651"Les Jardiniers Gustave Caillebotte"

 

Pour commencer ce cycle sur le thème "Jardiner c'était mieux avant...?"

je vous invite à une réflexion à partir d'un texte, écrit il y a plus de 20 ans, 

 par  mon Ami et mon Maitre ,

Roland Jancel

1940-2004

Personnalité marquante du monde des jardins, diplômé de l’école de Versailles,

dessinateur de talent,  ancien directeur du « SEVE » Service Espaces Verts Environnement de Nantes,

jurys National des villes et villages fleuris, 

ancien président de l’Association des Directeurs de Jardins, aujourd’hui Hortis,

Commandeur dans l’ordre du Mérite Agricole,

passionné par le magnolia dont il a contribué à faire de Nantes la capitale,

inventeur du concept de fleurissement aérien SIFU distribué par la société ATECH, …

(voir chapitre portraits  )

Magniolia

 

A la relecture de ce texte je me suis interrogé, 

comment l’interpréter aujourd’hui à l’heure des réseaux sociaux 

où toute le monde à un avis sur tout… mais surtout un avis.

Nostalgie d’une époque disparue,

Coup de gueule réactionnaire d’une personne aigrie refusant l’évolution et les nouvelles tendances,

Vision pessimiste du monde d’aujourd’hui,

Intuition prophétique d’un avenir incertain,

Déclaration d’amour au métier de jardinier,

Message d’alerte avant qu’il ne soit trop tard...

Les interprétations peuvent être diverses et variées.

Sachant tout le respect que j’ai envers la mémoire de Roland Jancel,

j’ai-je dois l’avouer un sentiment partagé.

Les jardiniers sont-ils en danger ?

Oui peut-être..., enfin pas tous... non pas vraiment ...

Ce texte m’a fait réfléchir, 

que d’évolutions depuis ma sortie de l’école d’horticulture d’Orléans CFPPH de La Mouillère en 1974. 

J’ai pensé aussitôt au sous-titre de l’excellent ouvrage d’Éric Lenoir

« Petit Traité du Jardin Punk » Prix Saint Fiacre 2019

« Apprendre à désapprendre ».

Il est temps de se remettre en question.

Changement des méthodes et techniques de travail et du fleurissement, 

évolution du style, de la gamme végétale, 

arrivé du Festival des Jardins de Chaumont sur Loire et de ces nouvelles tendances,

évolution du concours des villes & villages fleuris, 

changement des mentalités , des attentes des élus 

et surtout de la population, 

nouvelles préoccupations environnementales, réduction du personnel… 

et surtout pour amplifier le tout un dérèglement climatique incontrôlé et incontrôlable.

Alors que faire ?

Mais c’est quoi un vrai jardinier ?

Doit-on classer les jardiniers comme espèce en danger !

Avant d’essayer de répondre à ces questions, 

j’ai contacté la fille de Roland Jancel pour lui exposer mon projet et lui demandé son aval.

 j’ai ensuite décidé de sonder quelques proches et amis, 

personnes touchant de près ou de loin au monde du jardinage et de l’horticulture,

afin d’avoir leurs avis, sur ce texte que quelques-uns connaissaient.  

Alors on peut se poser la question : Jardiner, jardinier c’était mieux avant … ?

C’est à cette question que je vais essayer de répondre dans les prochaines semaines.

 

Mais attention quand on agite le passé avec nostalgie,

c'est que l'on ne fait plus confiance au présent

et que l'on est inquiet pour l'avenir...

 

Jardinier1 799x1024"Le vieux jardinier Emile Claus"

 

 

Il faut sauver le vrai Jardinier !!!

 A longueur de bulletins, les médias nous rebattent les oreilles

sur le grand nombre d’espèces animales et végétales qui risquent de disparaître

dans un proche avenir en raison d’une exploitation trop intensive de la ressource

ou de la disparition de leurs biotopes. 

Hélas  parmi les espèces en danger on ne cite jamais le vrai Jardinier ! 

Certes on continue à créer et entretenir de nouveaux espaces verts

et on revêt les agents de superbes tenues vertes fluorescentes

pour éviter qu’un automobiliste distrait vienne abonder l’hécatombe.

Malheureusement, là cette quantité n’est pas significative de qualité.  

Depuis quelques années sous couvert de pratiques philosophico-écologiques,

on fait adopter à nos » jardiniers  survivants

des procédures de travail tournant le dos à ces  savoir- faire patrimoniaux

qui  faisaient une de nos originalités  appréciées

entre autres sur le plan touristique même par nos voisins d’Outre-Manche .

Ces pratiques de netteté, de qualité du dessin, de richesse des décorations florales,

de rigueur , de maîtrise des volumes

  et de diversité botanique  appuyées sur une formation

 et l’expérience  d’un métier choisi et pratiqué obligatoirement avec passion.

 

Certes certaines de ces pratiques n’étaient pas exempte de reproches...

ainsi l’utilisation souvent trop souvent  mal maîtrisée des produits phytosanitaires.

On ne peut que se réjouir de leur abandon pour le plus grand profit de notre environnement,

mais de là  à se prosterner devant les "ex-mauvaises herbes"

Il y a une marche à ne pas franchir  ,

l’utilisation trop systématique de la flore indigène à des fins décoratives  a ses limites

car ce serait la négation de tout le travail des obtenteurs

qui nous ont donné par le passé de si bonnes et si solides variétés

qui ont fait la réputation de l’Horticulture nationale

ainsi faudrait il sous couvert de développement durable

laisser proliférer et essaimer un certain nombre d’indésirables,

de « pestes végétales » nuisibles aux cultures ou la santé

tels l’ambroisie, le  chardons,  le liseron et autres Baccharis.

 

Il n’est pas sûr que le contribuable plébiscite ces nouvelles orientations,

et un service public se doit en priorité de satisfaire les attentes de ses mandants.

 

La limitation ou la suppression de certaines prestations

peut sans doute  générer des économies de coût de gestion qui s’en plaindra ? 

Mais faudra t’il par exemple  sous prétexte d’économies d’eau

laisser se dessécher et mourir arbres et arbustes ? 

Ou ne plus fleurir parce que c’est ringard !

Pour les arbres morts qu’il faut remplacer

ce n’est plus de l’économie mais du gaspillage de deniers publics,

l’évolution de cette « brousse en mouvement » généralisée

qu’on voudrait nous préconiser va se traduire

à terme par un laisser aller

n’encourageant pas le respect des aménagements publics

or par expérience on sait qu’un entretien négligé

est facteur de vandalisme et de  dégradation  rapide.

 

Le jardin tel que beaucoup de gens l’entendent risque de  devenir une « friche apicole ».

L’appauvrissement de la gamme végétale va réduire la palette des plantes

dont le jardinier aura besoin

pour faire face aux nouveaux types d’aménagements

qu’il devra réaliser comme les toitures végétalisées, les voies de tramway ou les suspensions fleuries. 

Laissons au  « Maître de l’Art » les moyens d’exprimer son talent en toutes circonstances

c’est lui qui saura anticiper l’évolution du végétal dans l’espace et dans le temps .
 

Pour préserver cette spécificités gardons au jardinier la place qui lui revient .

Et en  nous gardant de tout corporatisme soyons malgré tout  réservés

voire méfiants vis à vis  de l’intervention de certaines professions

qui se targuent de faire de l’horticulture.

Elles cachent le plus souvent leurs lacunes  derrière des logorrhées  pseudo-techniques

destinées avant tout à séduire leurs interlocuteurs

sans leur donner la garantie de « bonne fin de chantier ».

Toute mauvaise surprise est évitée avec le jardinier,

par sa connaissance exhaustive  du végétal,

il saura lui réserver la place nécessaire

en terrain adéquat anticipant l’effet obtenu dans le temps,

le jardinier sera d’autant plus attentif au résultat

qu’il devra le plus souvent assurer la pérennité de l’aménagement réalisé.

 

Ce rôle irremplaçable du jardinier serait irrémédiablement condamné

sans les jeunes générations qui vont assurer le renouvellement

à condition de leur donner une formation de qualité

qui au delà de la rébarbative nomenclature botanique 

va leur permettre de posséder une connaissance parfaite

de la physiologie de la plante et d’ assimiler les techniques annexes

telles que la pédologie l’hydraulique , la gestion,  la connaissance ses réglementations ,

au de là de ces bases leur formation devra être régulièrement actualisée

tant l’évolution du métier est rapide et constante.

C’est cette nouvelle vague de professionnels

qui va nous faire les beaux jardins et les beaux paysages de demains

et qui  va  pérenniser et valoriser  ce beau métier de jardinier

dont le nom même est un honneur,

et non comme certains voudraient le faire croire  un synonyme de rusticité ,

de sabots de bois et chapeau de paille,

outre de ses connaissances spécifiques

le  jardinier sait aussi communiquer pour faire partager sa passion 

son savoir  son expérience ses astuces et ses tours de main voire faire naître des vocations

et à l’occasion de ces contacts informels,

faire passer les messages d’ alertes relatifs à  la sauvegarde de notre environnement,

sans arrières pensées dogmatiques,

chacun pourra à loisir supputer l’intérêt d’engager telles mesures  empruntent de bon sens terrien.

 Bravo si la friche apicole peut assurer la convalescence de notre Environnement

et la sauvegarde des abeilles encore faut il laisser de quoi butiner au Jardinier

et lui permettre d’être digne de l’héritage que nous ont laissé:

André Le Nôtre , Edouard André,  La Quintynie Barillet Des champs et autres grands anciens !

 

Pour terminer laissons  la conclusion de ce plaidoyer pour la sauvegarde du vrai Jardinier

  à Antoine de Saint Exupéry qui répondant  à quelqu’un

qui le complimentait sur sa carrière de pilote et d’écrivain

  déclara :"et dire que moi je voulais être Jardinier. !!! »                         

   Roland Jancel

 

Date de dernière mise à jour : 2025-06-22

Ajouter un commentaire